8, 9, 10 NOVEMBRE 2013
« Ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection »
(Luc 20, 27-38)
Dans sa progression vers Jérusalem, Jésus n’échappe pas à la polémique. On veut même l’y entraîner et l’obliger à prendre position. Les situations politiques, sociales ou religieuses délicates ne manquent pas. Un mot du Maître pourrait avoir de fâcheuses conséquences et même présider à son emprisonnement. De fait, Jésus n’entre pas dans les polémiques politiques mais rappelle des principes généraux de la vie commune et du bien commun. Il s’intéresse aux laissés pour compte de la société et rappelle notre devoir de solidarité et de charité, venant de l’Alliance même et de la Loi divine. Jésus ne veut pas polémiquer sur les questions religieuses mais il doit pourtant indiquer une voie, un style, une approche. Cette approche est nouvelle et nous invite à reconsidérer les choses avec d’autres yeux. Certaines vérités sont rappelées pour en mesurer les conséquences spirituelles et donc sociales et politiques. Dieu n’est pas indifférent à notre situation. Il est le Dieu des vivants et son action s’étend à toutes ses créatures. La Création a préparé les choses. L’Incarnation a sanctifié les choses de l’intérieur. La Résurrection a divinisé les choses. La lumière éclate par le Verbe de Vie et par la clarté pascale. De l’intérieur, la transformation est en œuvre. La Transfiguration s’accomplit. 1. La Résurrection pour maintenant. La question des sadducéens nous étonne mais fait partie de ces questions polémiques qui cherchent l’affrontement et non le dialogue. Certains ne cherchent pas à dialoguer mais à entraîner l’autre vers soi, en le piégeant ou en l’amenant sur des terrains douteux. On le voit dans l’Évangile, Jésus s’en sort toujours avec brio. De par sa connaissance et sa vie de communion avec le Père, il élève le débat et évite les pièges. La loi est faite pour grandir en humanité et en vérité et non pour empêcher la vie ou pour cloisonner les personnes. Ici, la loi de Moïse tentait de répondre à des situations extrêmes mais ne pouvait prétendre à répondre à toutes les circonstances particulières. Ainsi, Jésus, de nouveau, revient à l’essentiel et introduit la question, dans une conception générale de la loi et donc de la volonté divine. De plus, l’événement pascal vient éclairer de ses feux la vie nouvelle dans le Fils. La filiation divine est donnée et s’inscrit dans notre nature humaine préparée et sanctifiée. Résurrection et filiation : de créature de Dieu, nous devenons des fils/filles du Père. La Résurrection vient révéler la paternité de Dieu, cette paternité annoncée et vécue par Jésus. Dieu est Père et nous veut comme fils/filles. Le Fils détruit nos images par trop païennes du divin en y introduisant la relation et l’amour. C’est l’Esprit Saint qui fait le lien. Notre vie est donc filiale car elle est expression de cet amour qui s’exprime en Dieu. Et comme Dieu est Trinité, notre vie est trinitaire, c’est-à-dire relationnelle, de communion dans l’amour. Cela a des conséquences non seulement dans notre vie spirituelle et ecclésiale mais aussi dans nos conceptions anthropologiques, philosophiques et évidemment théologiques. Relation, altérité, don de soi… amour : au cœur de la vie, au cœur de l’humain ! Résurrection et vie communautaire : de partenaire vivant ensemble pour affronter les périls du monde, nous devenons frères et sœurs. La Résurrection vient révéler la fraternité comme une réalité et solidarité qui dépasse une banale philanthropie ou le simple partage d’un dénominateur commun. Le lien établi en Christ est un lien vital et ontologique, touchant les fibres de l’homme qui se sait désormais en communion avec l’autre et pas seulement en partenariat. De même qu’il est le lien d’amour du Père et du Fils, l’Esprit Saint est le lien de communion entre les humains, entre les hommes et les femmes, entre le Ciel et la Terre. Les relations en la Trinité entraînent et colorent ces relations entre nous, trinitaires de la même façon, c’est-à-dire présidées par l’Agapé avec toute sa force de vie et de création. Relation, altérité, don de soi… amour : au cœur de nos vies, de nos relations, au cœur de l’humain ! Résurrection et vie sociale et politique : de membres d’une cité, de numéro, nous devenons le Peuple de Dieu, peuple de fils/filles et de frères/sœurs. La Résurrection vient révéler notre identité et notre destin commun. Même si les particularités des populations doivent être respectées, nous sommes l’unique Peuple du Dieu Unique, mais aussi le Corps mystique du Christ ressuscité et le Temple de l’Esprit Saint où se vit l’amour. Le Bien commun est notre objectif car tous frères et sœurs, nous aspirons aux mêmes bénédictions et à la même justice. Ainsi, les lois s’écartant de la loi naturelle (ordre de la Création) ou de la loi révélée (ordre de l’Écriture et de la Tradition Apostoliques) détruisent plus qu’elles n’aident. L’ordre social et politique doit refléter cette harmonie et cet équilibre qui vient du Créateur, révélé Père par son Fils dans l’Esprit. Relation, altérité, don de soi… amour : au cœur du politique et du social car au cœur de l’humain ! Si le Christ est vraiment ressuscité, c’est la joie pascale qui fait surgir la vie et qui donne la lumière pour vivre aujourd’hui de cet amour trinitaire, éternel. 2. Ressuscités pour l’éternité. La foi en la vie éternelle a eu bien des difficultés à s’imposer. Elle fait partie de cette réflexion qui traverse la Bible et prend son apogée en la Résurrection de Jésus. Dieu ne nous aurait-il créés que pour un bref passage, tourmenté souvent, douloureux parfois, quelque fois heureux et paisible ? La prise de position des croyants, affrontés à la persécution et à l’opposition (Maccabées 7) n’est-elle qu’illusion ou que combat inutile ? L’Éternel nous donne l’éternité car il est Père et que la vie trinitaire déborde de vie et d’amour. Vie éternelle : c’est la grande annonce de Pâques : la vie éternelle est accordée aux mortels qui, par la force de la Résurrection, entrent dans une dynamique nouvelle. L’Incarnation a uni l’Humain et le Divin. La Résurrection propulse l’Humain dans le Divin. La communion est possible car la chair est sanctifiée et divinisée. Notre présent, c’est le ‘toujours de Dieu’. Notre avenir, c’est le ‘présent de Dieu’, l’instant éternel de l’amour. Vie trinitaire : c’est la grande annonce de Pâques : la vie éternelle est contemplation et communion en la Trinité. Nous n’assistons pas au spectacle divin d’un amour sans nous. Nous participons aux relations trinitaires éternelles par notre union au Fils et le lien de l’Esprit. Ainsi, le ‘baiser du Père et du Fils’ (St Bernard) devient notre baiser éternel. Nous entrons au cœur du Mystère, d’une relation, d’une communion. Notre chair transfigurée participe de cette explosion de vie dans l’amour. 3. Conclusion : le Dieu des vivants ! Le Christ nous révèle un ‘après’ qui vient du ‘maintenant’. Maintenant, l’éternité s’introduit dans nos vies et nous prépare à la rencontre. L‘éternité commence dans notre quotidien par la Résurrection. Le Christ nous révèle le Père, Dieu vivant qui nous attire vers lui pour une communion dans l’amour.
— Père Francis
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