« Confiance ! C’est moi, n’ayez pas peur ! »
(Mat 14, 22-33)
Comprendre Jésus n’aura pas été facile pour les disciples. Malgré les 3 ans passés à ses côtés, ils auront besoin de l’Esprit Saint pour saisir la profondeur de sa mission et de son identité. Bien des épisodes relatés dans l’Évangile laissent apparaître le mystère de sa personne et de sa relation avec Dieu. Ils nous appellent à l’humilité et à la foi. Ils font apparaître ce qui est caché en soulevant le voile, en percevant la vérité, en acceptant la grâce. Le matin de Pâques, tout sera clair : le messie, ce Jésus de Nazareth bien de chez nous, est le Fils de Dieu, la présence divine bien plus pointue et plus réelle que les Tables de la Loi conservées dans le Temple. Ce Jésus, c’est Dieu parmi nous. L’accueillir dans sa vie, c’est trouver la vie éternelle. Y mettre sa foi, c’est devenir fils et filles de Dieu. L’aimer, c’est entrer dans la communion trinitaire. Ainsi, l’épisode relatant Jésus marchant sur la mer : au-delà du fait extraordinaire qui pourrait nous distraire, c’est le Seigneur créateur qui se manifeste, c’est le Maître qui commande, c’est le Fils qui domine. L’amour nous rejoint par le Fils qui nous fait signe mais qui est Signe de l’amour du Père. L’Esprit est donné à tous ceux qui reconnaissent le signe divin.
- 1. Le Seigneur de la tempête.
Jésus montre à plusieurs reprises sa maîtrise des éléments et sa seigneurie sur l’univers. Sans perturber le cours des choses ou modifier les lois naturelles, ils se montrent maître et Seigneur. La maladie recule, le vin coule en abondance, le pain se multiplie, la tempête se calme. Marcher sur l’eau, c’est montrer sa puissance. Apaiser la mer, c’est maîtriser les forces du mal. Passer à travers les éléments déchainés, c’est les mettre au service de la révélation. Il est vraiment le Fils de Dieu.
Seigneur Créateur : l’Évangile nous montre un Jésus plein de maîtrise. S’il est Sauveur, c’est qu’il est Créateur. Celui des fins dernières est aussi celui des origines. Aller vers le Christ, c’est reconnaître qu’il est à la source de tout. Création et salut sont un tout qui entre dans l’Alpha et l’Oméga du Christ. Jésus marchant sur la mer se montre le maître créateur de l’univers, un univers qu’il contrôle, qu’il maîtrise, qu’il a formé lui-même. Le Christ notre Dieu est Maître du monde.
Seigneur Sauveur : l’Évangile nous montre un Jésus orienté vers le salut de l’humanité. Le péché ayant dévoyé la relation avec Dieu, il vient rétablir ce lien par une vie humble d’obéissance et de confiance. Celui qui a créé est aussi celui qui peut sauver. Le salut s’inscrit dans le Création et vient à son secours. C’est tout l’univers qui bénéficiera de la grâce pascale jusqu’à l’accomplissement définitive des promesses. Jésus marchant sur les eaux se montre le Sauveur de ce monde en déroute foudroyé par la peur. Il maîtrise l’humanité en y insufflant son pardon et en l’aimant. Il vient à sa rencontre sans craindre de prendre notre chair pour la sanctifier et le rendre ‘capable de Dieu’. Le Christ notre Dieu est le Sauveur du monde.
Seigneur Fils du Père : l’Évangile nous montre un Jésus abimé en Dieu son Père. Il n’est que relation et amour. Le Père et lui ne forment qu’un dans l’éternité trinitaire et pour le bonheur des hommes. On ne comprend Jésus qu’en l’associant à Dieu son Père. On ne saisit sa mission qu’en y voyant la volonté du Père. On ne l’aime qu’en aimant le Père en lui et par lui. Il n’y a pas de distance ni de mésentente, il n’y a que communion et harmonie. Malgré l’incarnation et peut-être plus encore par elle, le Père et le Fils restent unis dans l’Esprit. Ce corps de chair s’inscrit dans la relation et participe à notre salut. Il entrera définitivement dans le cœur de la Trinité en la Résurrection / Ascension du Fils. Jésus marchant sur les eaux se montre le Fils du Père et claire expression de son Être. Il marche vers nous les mains tendues pour mieux nous enlacer, pour exprimer par des gestes humains tout l’amour divin. Jésus maîtrise la relation en nous la proposant. Il est maître d’amour, ouvrant le Ciel et pointant le Père dans l’Esprit Saint. Le Christ notre Dieu est le Fils, pure beauté du Père.
Marcher sur les eaux n’est pas qu’un miracle, c’est un signe, le signe du Seigneur Créateur et Sauveur, Maître de l’univers mais surtout Fils révélant l’amour du Père. C’est l’Esprit qui nous pousse maintenant dans les bras de Dieu.
- 2. Le Seigneur de nos tempêtes.
La tempête n’est pas qu’externe, elle peut être intérieure, d’une rare violence. Nous passons à travers des tourments et des épreuves qui nous déstabilisent et nous déconcertent. Nos vies ne sont pas de longs fleuves tranquilles se délassant sous un soleil de merveilles. Elles ressemblent parfois à ces méandres infinis qui n’en finissent plus de s’étirer dans la précarité matérielle, affective et spirituelle. Le Seigneur nous rejoint dans ces tempêtes intérieures qui nous font si peur et qui nous découragent. Il est Maître de l’univers et donc de nos vies. Il maîtrise la vie comme l’existence, si on le laisse faire. Pierre s’avançant sur les eaux nous ressemblent tant : plein de courage mais plein de peur, prêt à tout mais avec restriction, heureux de voir le Maître mais peureux de se perdre. Seules les mains du Christ peuvent nous tirer d’affaire. Plongeons nos yeux dans ceux du Christ, là est le paradis.
La tempête nous entoure : si on se concentre sur nos peurs et sur nos difficultés, comment voir le Christ qui s’avance vers nous ? Il est là, avec nous, dans le tourment et la violence des éléments. Regarder vers le bas, ses seuls pieds… regarder autour de soi les seuls tourbillons qui nous entourent… c’est la noyade, la perdition, la peur. Regarder vers le Christ, c’est trouver la voie, c’est passer la tornade, c’est trouver la paix. Ses yeux nous encouragent et nous portent.
La tempête nous apaise : si on regarde en avant sans se laisser impressionner par l’orage ou sans s’arrêter aux tonnerres, la violence même nous porte et nous désigne le Sauveur. Le Christ tend sa main, à nous de la saisir et de remonter vers la surface, vers le ciel bleu au-delà des nuages. Alors marcher sur l’eau, avec le Christ, ne sera qu’un autre signe, celui de l’amour. Alors nous serons nous aussi signes par amour. Alors nous goûterons à la présence réelle du Père qui, par le Christ dans l’Esprit, nous accueille dans ses bras.
- 3. Conclusion : l’amour qui apaise !
La tempête n’arrête pas le Créateur qui maîtrise sa Création et domine le mal et l’univers.
La tempête nous montre le Sauveur avançant vers ses frères pour leur montrer à quel point Dieu les aime.
La tempête dans nos vies ne s’apaise qu’à travers les yeux du Christ dont la contemplation introduit à la présence du Père
La tempête de la vie n’est qu’un passage vers le cœur de la Trinité qui nous aime et qui nous attend. « Homme de peu de foi, pourquoi douter ? », « entre dans le joie de ton Maître ».
Père Francis