« Il vit les cieux se déchirer »
(Marc 1, 7-11)
Les fêtes de Noël s’achèvent avec cette célébration du Baptême de Jésus. Jésus se soumet à un rite de pénitence même s’il n’en a pas besoin. Il marque ainsi sa solidarité avec le peuple qu’il vient sauver et auquel il est envoyé comme Rédempteur. Jean le Baptiste reconnaît la particularité de Jésus, sa sainteté, sa mission et son identité. Il le désignera comme « l’Agneau de Dieu ». Pour cela, il donnera sa vie et son martyre est le plus beau témoignage de son amour. Jésus entreprend donc sa mission : il est consacré par l’Esprit pour porter la Bonne Nouvelle. Il annoncera l’amour du Père et la grâce de l’Esprit. Même si son origine divine avait été annoncée par l’Ange et reconnue par Marie et Joseph, par les bergers et les mages, cet épisode est particulièrement important car la voix du Père se fait entendre et l’Esprit se manifeste sous forme d’une colombe. Il n’y a plus de doute : c’est le Fils. La lumière de Pâques nous en donnera la conviction et la bénédiction. Dieu est Trinité et donc amour. Dieu se communique, il est Communion qui se partage. Mission et identité se confondent pour notre salut et notre adoption filiale.
- 1. Épiphanie de la Trinité
Dieu s’est manifesté de bien des manières. Il s’est fait connaître par création et par révélation. Le spectacle de l’univers glorifie le Créateur. L’appel d’Abraham change sa vie et le cours de l’histoire. Moïse le rencontre au désert, la Loi est donnée, l’Alliance est conclue. Les prophètes parlent en son Nom… On en sait plus sur lui, sur sa volonté, sur sa miséricorde. Il faudra Jésus pour pénétrer le mystère, pour entrer dans l’intimité du Père, pour percevoir l’action de l’Esprit. Ce Jésus se révèle lui-même, peu-à-peu, le Verbe divin, le Fils du très-haut, le reflet du Père. Se mettent en place une nouvelle théologie, une nouvelle spiritualité, une nouvelle façon de penser et de prier. Dieu est Un, certes mais Dieu est Trine. Dieu est juste certes mais Dieu est Amour. Dieu est Dieu, il est Père et Fils et Saint Esprit.
Le Fils se révèle : la mission de Jésus est de faire connaître Dieu tout en sauvant l’humanité allant à sa perte à cause de son péché et de son orgueil. Sa mission va dévoiler son identité. Sa mission de salut prend une dimension sublime parce qu’elle est accomplie par Dieu lui-même. En effet, Jésus le Christ est le Fils de Dieu. Alors on perçoit l’incroyable de sa naissance, l’extraordinaire de ses paroles, la profondeur de ses actes, la grandeur de sa personne, l’universalité de son salut, la luminosité de sa Passion, la gloire de sa Résurrection. Lui seul peut révéler les secrets de Dieu ou appeler Dieu « Mon Père », ce qu’il nous transmettra par « Notre Père », étant appelés à partager cette Bonne Nouvelle. Le Fils est la gloire du Père et la lumière de sa Face céleste.
Le Père se révèle : la mission du Père est de se révéler en son Fils et de nous sauver par son Fils. Sa volonté est de partager sa divinité, ce qu’Adam et Eve ont tenté de dérober alors qu’il leur était présenté. Si le Fils est Dieu, le Père est Dieu. Non pas monolithe éternel mais Personne Divine qui aime et partage, qui se reconnaît en son Fils, son Vis-à-Vis éternel dans l’amour. Dieu est Père : sa voix se fait entendre mais son Visage se reflète sur le visage de Jésus-Christ. Lui seul peut nous parler de son Père car il vient de lui et retourne vers lui. Tout ce qui a été dit sur Dieu au cours de l’histoire est bien pauvre devant la révélation ultime, sublime et lumineuse du Fils. Tout ce qu’on peut dire de Dieu partira de la Personne du Fils et mettra notre raison, notre intelligence, notre cœur en action, en réflexion, en communion. A partir du Fils, et par lui, tout s’illumine. C’est un défi mais c’est surtout une joie, celle de se savoir aimé. Le Père est la gloire du Fils dans la joie de la communion.
L’Esprit se révèle : la mission de l’Esprit est de révéler, de dévoiler, de mettre en lien. Il prépare et purifie. Il sanctifie les membres du Corps mystique pour les incorporer à la gloire trinitaire. On aura perçu l’Esprit dans l’Ancien testament, on le verra à l’œuvre dans le Nouveau testament. Donné en abondance à la Pentecôte, il est l’âme de l’Église, le moteur intérieur, la force invisible, le don suprême. Au baptême, on le reçoit en plénitude. A la confirmation, on lui laisse toute la place. A la communion eucharistique, il pénètre nos cœurs pour une communion éternelle dans l’amour. L’Esprit est la gloire du Père et du Fils parce qu’il en est l’amour.
Le baptême de Jésus n’est pas un événement insignifiant ni même une simple solidarité avec les pécheurs. C’est le lieu de la révélation trinitaire et de l’envoi en mission. Parce qu’il est le Fils, Jésus pourra accomplir le salut de l’humanité pour la gloire du Père dans l’Esprit d’amour.
- 2. Épiphanie de l’humanité.
Quand Dieu se révèle, il révèle aussi notre identité en tant qu’homme ou femme. Sa volonté épouse notre identité. Elle ne vient pas la violenter ou l’asservir. Connaître Dieu, c’est mieux se connaître soi-même et comprendre sa vocation personnelle et commune. On a tort d’avoir peur ou de craindre de perdre son autonomie ou sa liberté. Nous sommes créés autonomes et libres mais cette autonomie et cette liberté sont une conquête, un défi, un objectif. Les choix sont difficiles mais ils nous appartiennent. Le chemin est rude mais personne ne peut le faire à notre place. Les tentations sont nombreuses mais non insurmontables. Le péché nous guette mais il ne fait pas partie de notre nature humaine. La vie est un don, à nous de le comprendre dans l’amour.
Humanité blessée : on ne peut que le reconnaître, le cœur des hommes est malade (Jér 17, 9). L’homme est compliqué. Notre conscience est obscurcie. Nos aspirations sont parfois perverties. Nos désirs sont incontrôlables. Notre violence s’expose en bien des situations. Cette humanité est blessée et ne demande que la guérison. Où la trouvera-t-elle sinon en Dieu son Créateur et son Rédempteur ? Dieu n’abandonne pas sa créature. Mieux encore, il en fait son enfant dans l’amour. La blessure trouve son baume dans la miséricorde divine et l’amour trinitaire.
Humanité transfigurée : on ne peut que le reconnaître, le cœur de l’homme est transporté par la grâce. C’est la joie de se savoir aimé et sauvé, reconnu et choyé. C’est la joie filiale qui éclate au matin de Pâques. C’est la communion qui s’établit en la Sainte Trinité. C’est l’amour qui dépasse tout, qui déplace tout, qui embrase tout. La transfiguration trouve son éclat dans la communion trinitaire.
- 3. Conclusion : mission et identité.
Le baptême de Jésus révèle sa mission : il est envoyé sauver l’humanité et rétablir le lien rompu avec le Dieu créateur.
Le baptême de Jésus révèle son identité : il est le Fils bien aimé en qui Dieu trouve sa joie et se révèle Père dans l’Esprit Saint. Ce Dieu est amour parce qu’il est Trinité. La Trinité est amour qui invite à la communion éternelle. Jésus le Christ est le reflet du sourire du Père dans la joie de l’Esprit Saint.
P. Francis