« Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? »
(Luc 2, 41-52)
Le Christ est né. Il est parmi nous. Il vient nous sauver par son règne d’amour. Nous l’attendions comme un messie envoyé par Dieu, c’est Dieu lui-même qui vient. Cet événement extraordinaire change nos perspectives et motive notre agir. Dieu est avec nous, il a pris notre chair pour y insuffler sa vie divine. Nous sommes ses fils et filles par le Christ ressuscité qui nous y a préparés par son incarnation. C’est une bonne nouvelle. Noël nous enchante par son mystère et sa grandeur. Dieu vient et nous emporte en lui en touchant notre être et notre vie. Nous vivons par lui désormais. Toute notre réalité humaine est entraînée vers le Ciel qui se trouve en nous car Dieu y a fait sa demeure. Tous les aspects de notre vie sont bouleversés par cette perspective nouvelle et intérieure. Jésus est le reflet du Père par son Esprit Saint. Sa présence parmi nous est présence divine. Sa marche sur nos chemins est marche vers le Ciel. Il a cependant voulu venir à nous de façon naturelle même s’il y a du surnaturel dans sa conception et sa naissance. Il grandira dans une famille qui fera de lui un homme tout en étant Dieu. La Sainte famille prépare Jésus à sa mission salvatrice.
- 1. La famille, lieu d’expériences.
On parle beaucoup de la famille aujourd’hui, soit pour la défendre, soit pour la dénigrer, soit pour la recomposer. Elle reste un lieu de vie où chacun fait ses premières expériences et s’initie à la vie. C’est pourquoi les idées se bousculent en fonction des repères, des idéologies ou des intérêts. Il est vrai que notre idée de l’homme et donc notre anthropologie, va affecter nos décisions. C’est cet homme-là qui va faire famille. Pour nous, la Sainte famille est un exemple à l’image de la Trinité Sainte.
Apprendre à être : on se découvre soi-même dans sa famille. Elle est le lieu de la découverte et de la confrontation. Chacun y tient sa place et personne ne doit prendre la place de l’autre. Chaque fonction est désignée et doit être respectée. Éviter la confusion est nécessaire afin de trouver sa personnalité et de respecter l’altérité des sexes et des générations. On voit, dans la Sainte famille, Jésus soumit à ses parents et respectant les rôles tout en affirmant sa personnalité.
Apprendre à aimer : on découvre sa capacité d’aimer dans sa famille. L’amour y est central et son manque y est dramatique. Aimer n’est pas simple mais dépasse les préjugés et les limites. Les faiblesses sont légions mais les possibilités sont multiples. L’amour blessé apprend le pardon. L’amour bafoué apprend à renaître. L’amour pur s’apprend à tout âge. On voit dans la Sainte famille, un amour profond et nouveau entre Marie et Joseph, un amour sans limite pour l’enfant Jésus, un amour théologal qui va élever cette Famille à la sphère divine.
Apprendre à vivre : on découvre les relations humaines dans sa famille. Sans irénisme, on perçoit la réalité du quotidien. Les conflits ne manquent pas. Les oppositions peuvent nous étouffer. C’est cependant là qu’on apprend à gérer ses émotions et ses relations. Microcosme social, la famille reflète les conflits de la société et les difficiles relations interpersonnelles. Il reste qu’on y parfait son caractère et qu’on y trouve ses forces et ses valeurs. On voit dans la Sainte Famille quelques différences d’opinions qui ne rompent pas l’unité et la communion. Jésus resté au temple affirme sa volonté de faire celle du Père sans toutefois briser le cœur de Marie et Joseph. Chacun doit « s’adapter » à l’autre et à sa spécificité.
Apprendre à prier : On découvre ses forces spirituelles dans sa famille. Notre vision de Dieu et notre pratique religieuse s’expérimentent en famille. Il ne s’agit pas de choisir plus tard mais de compléter plus tard ses informations et ses croyances. Il s’agit de faire ensemble l’expérience de Dieu dans la diversité des personnes et l’unité des cœurs. C’est là qu’on développe ses valeurs et donc le sens de l’existence. On donne de la qualité aux relations et rééquilibre les choses. Malheureusement, c’est l’aspect le plus négligé aujourd’hui alors qu’on devient soi-même grâce à une lignée et une histoire, des valeurs transmises et une profondeur spirituelle, une existence acceptée avec ses limites et des choix assumés. On voit dans la Sainte Famille, Joseph inscrivant Jésus dans une généalogie et un peuple, une religion et une mission. On voit Marie transmettant les valeurs familiales et spirituelles et donnant à Jésus sa liberté d’homme.
La famille reste un lieu d’écoute et d’expérience où chacun devient soi-même s’il est respecté et aimé. On y trouve, malgré les conflits, ses valeurs et le sens de sa vie. Ouverte à la transcendance, la famille est le lieu d’expérience spirituelle et de liberté par excellence.
- 2. La famille à l’image de la Trinité.
Parler de famille, c’est parler de Dieu. Défendre la famille, c’est défendre une certaine idée de Dieu. Le Dieu révélé en Jésus-Christ est Trinité. Jésus se doit d’être aux affaires de son Père. Sa mystérieuse réponse à Marie et Joseph nous introduit dans une relation profonde et essentielle.
Jésus, Fils du Père : Joseph a protégé Jésus et l’a inséré dans une famille et un peuple. Il a été le modère paternel de Jésus. On peut croire que ce modèle a été à la hauteur de sa tâche car Jésus a parlé de façon extraordinaire de son Père céleste. Le père adoptif a suggéré le Père éternel. Joseph a su s’effacer pour laisser Jésus parler de son Père et annoncer une relation filiale unique. De la paternité terrestre à la paternité divine, il n’y a qu’un pas. Nos pères terrestres sont des voies pour nous mener au Père céleste s’ils accomplissent leur mission en vérité.
La Trinité, la communion dans l’amour: On compare parfois la Trinité à une famille toute proportion gardée. Il est mieux de parler de communion dans l’amour, certes comme en famille, mais ici entre Personnes divines uniques et différentes dans un échange d’amour éternel, sans fusion, sans confusion, sans conflit. La Trinité est un idéal pour nous, pour nos familles, nos communautés et notre Église. Elle est aussi un modèle social à découvrir. Nos familles devraient s’inspirer de ce modère trinitaire pour établir des valeurs et des référents et s’enraciner dans l’amour.
- 3. Conclusion : l’amour nous unit.
Parler de Noël, c’est parler d’une famille particulière au cœur de l’événement. Un homme, une femme et un enfant qui ont accueilli la volonté de Dieu et l’ont appliquée.
Parler de Noël, c’est redécouvrir l’importance de nos valeurs humaines élevées par les valeurs spirituelles et théologales.
Parler de Noël, c’est parler d’amour, d’amours humaines si belles et profondes, conjugales, familiales, filiales, fraternelles… c’est parler d’amour divin si grand et proche, d’amour trinitaire.
P. Francis