« Il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe »
(Mat 3, 13-17)
Il est symptomatique qu’au début de l’Eglise, l’Epiphanie était la fête des ‘manifestations’, des signes de la présence de Dieu parmi nous. On regroupait dans la même fête la venue des mages, le baptême de Jésus au Jourdain et les noces de Cana. Autant de moments par lesquels Dieu se manifestait et se révélait. Il s’agit bien, en ce temps de Noël, de découvrir l’œuvre de Dieu, sa manifestation dans notre chair et donc dans notre histoire, dans notre monde, dans notre quotidien si banal. Dieu entre dans le monde et se fait l’un de nous. Il parle désormais par Jésus de Nazareth et se révèle à travers lui, ses paroles, ses actes, sa vie et sa mort mais surtout à travers sa Résurrection, moment de lumière et de grâce pour l’humanité et l’univers. Au Jourdain, Jésus reçoit sa mission : il est consacré par l’Esprit et envoyé. Son identité divine est clairement exprimée. Uni au Père et vivant de l’Esprit, Jésus révèle le mystère trinitaire dans toute sa beauté. Il n’y a que l’amour qui nous permettra de percevoir la profondeur et la grandeur de notre Dieu.
- 1. Le baptême de Jésus : révélation trinitaire.
On pourrait se centrer sur le magnifique dialogue entre Jésus et Jean Baptiste. Le serviteur rencontre le maître et le reconnaît. Il ne se sent pas digne de le baptiser de ce baptême de pénitence et de conversion, premier pas vers plus de cohérence. Le baptême de Jean Baptiste n’est qu’une purification rituelle qui engage à une vie pure et respectueuse de la Loi. Jésus n’a certes pas besoin de ce baptême. Il s’y soumet en solidarité avec les pécheurs et pour partager jusqu’au bout notre condition humaine, faite de bénédictions et de péchés, d’amour et de refus, de hauts et de bas. Jésus vient ‘accomplir’ ce qui est juste, la Loi et les Prophètes, c’est-à-dire rétablir le lien entre Dieu et les hommes d’une façon plus intérieure et plus parfaite. En allant jusqu’au bout de sa mission salvifique, il transformera le baptême de pénitence de Jean Baptiste en baptême de grâce, porte d’entrée dans les relations filiales nouvelles. Il le fait parce qu’il est le Fils bien-aimé !
Jésus, lien du Ciel et de la Terre : Jésus sort de l’eau et le Ciel s’ouvre, l’Esprit descend sur lui. Ce mouvement rendu parfaitement dans le texte original grec de Matthieu vient nous signifier le lien des deux mondes en Jésus. Il est la connexion, l’intermédiaire, le point de passage, le médiateur… entre Dieu et l’humanité. A Noël, nous avons fêté la venue du Fils en notre chair, l’incarnation merveilleuse qui nous ouvre le Ciel par cet échange extraordinaire que l’intelligence ne peut totalement saisir. Ici, Jésus nous le rend encore plus clairement : il est celui que Dieu a envoyé pour ‘ouvrir le Ciel’, ‘donner l’Esprit Saint’ et introduire dans la présence du Père. Vrai homme par Marie et vrai Dieu, il est le Verbe éternel. Il assumera les prérogatives du messie (Isaïe 42, 1-4. 6-7) de façon excellente et les portera à leur achèvement dans son mystère pascal.
Jésus, uni au Père dans l’amour : la voix qui se fait entendre en ce moment crucial de la vie de Jésus le confirme dans son identité. La voix ne lui dit pas quoi faire mais qui il est. Quand Jésus saisit pleinement qui il est, il sait quoi faire ! Cette voix, cette clameur, ce bruit caractéristique, ce vent, ce souffle… tant de fois entendue au cours de l’Histoire Sainte se manifeste à nouveau et exprime parfaitement l’identité de Jésus : « celui-ci est mon Fils bien-aimé ». La voix s’adresse à l’assistance, elle est une révélation, non pas pour Jésus mais pour nous. Dieu manifeste son amour dans l’identité de Jésus. Le lien qui les unit est un lien d’amour. En pointant le Fils, Dieu se révèle Père !
Jésus vivant de l’Esprit : comme une colombe, l’Esprit descend. Ce symbole de pureté et de liberté nous renseigne sur l’Esprit, force et amour du Père et du Fils. Jésus sera consacré par l’Esprit (Actes 10, 34-38) et envoyé annoncer la Bonne Nouvelle, ce temps de grâce obtenu en lui et qui aboutit dans le Royaume. Toute sa vie durant, Jésus sera sous la mouvance de l’Esprit, cet Esprit présent à l’origine, au cours de l’histoire d’Israël et au moment de l’Incarnation. C’est ce même Esprit qui nous est donné au baptême et qui nous accompagne à la confirmation et toute notre vie.
On le voit, le baptême de Jésus n’est pas un événement mineur de sa vie. Il est révélation de son identité et de sa mission. Un nouveau monde commence et Jean Baptiste peut se retirer. Une nouvelle révélation est donnée et la Loi et le Prophètes sont accomplis de façon éminente. Toute la Trinité entre en action.
- 2. Le baptême de Jésus : révélation de sa mission
Jésus est bien consacré par l’Esprit. L’Esprit est son compagnon de route et sa force. Il est présence de Dieu et communion avec le Père durant sa vie terrestre comme il l’a été de toute éternité dans la Trinité. Les relations trinitaires sont dévoilées pour nous les partager et nous y inviter. La Trinité éternelle est la même Trinité en action.
Mission de salut : le péché nous a éloignés de Dieu et a brouillé nos relations. Alors que Dieu nous aime, nous doutons de son amour ou cherchons d’autres amours ailleurs. Le péché est ce refus d’aimer ou un dévoiement de l’amour. Le pardon nous est obtenu en Jésus Christ. Sa croix a purifié nos fautes et nous a rétablis dans les relations. A cause du péché, la mission de Jésus a pris une dimension rédemptrice. L’amour de Dieu est allé jusque-là !
Mission de communion : le Christ nous a rétablis dans les relations. Non pas des relations de maître à esclaves ou de Dieu à serviteurs soumis mais des relations filiales. En Jésus, toute l’Ecriture prend un sens nouveau et s’éclaire : la volonté de Dieu de se manifester était l’expression de son amour inconditionnel. On comprend mieux le pourquoi des commandements, de la Loi, du culte, de la prière, du sacrifice… Par Jésus, nous devenons des fils/filles et nos relations se transforment. La communion est notre objectif et peut être vécue dès maintenant.
- 3. Conclusion : un amour qui nous dépasse !
Le baptême de Jésus est une épiphanie divine : Dieu se manifeste et déclare sa volonté. Il dit la vérité et oriente notre vie. En désignant Jésus comme son Fils, il parle de Lui comme communion et comme amour. Si Jésus est vraiment le Fils de Dieu, Dieu est Père. Ces réalités éternelles sont à comprendre de façon analogique. Elles ne s’expliquent que dans l’amour des Personnes Divines en la Trinité.
Le baptême de Jésus est le début d’une mission : Dieu envoie son Fils et lui donne mission dans l’Esprit de ramener ceux qui deviendront ses enfants. Cette mission prendra un tour dramatique, certes, par la mort du Christ mais sera victorieuse et éclatante par sa Résurrection. Il est temps de suivre Jésus maintenant et de l’accompagner dans sa mission jusqu’en sa gloire.
P. Francis