« Marie se mit en route rapidement… »
(Luc 1, 39-45)
Noël est à notre porte et la liturgie s’emballe. La neuvaine de Noël nous introduit dans les événements précédents la naissance du Christ. Elle met en scène des hommes et des femmes qui ont participé à leur niveau, avec leurs manières de ce moment historique et spirituel, moment de lumière pour l’histoire et de grâce pour l’humanité en marche. Dieu a choisi un peuple, des personnes, des lieux… pour préparer pendant des siècles cette naissance. Il s’est associé des personnes pour la rendre possible dans le respect de la nature et de l’humanité mais la nouveauté de la divinité et l’irruption de l’invisible dans le visible. Nous avons ici une harmonie exceptionnelle, une communion particulière, un exemple de la paix et de l’unité qui règne en Dieu, Maître et Créateur de monde visible et invisible, Origine de tout et de tous, Père, Fils et Esprit Saint. Toute la Trinité est à l’œuvre dans cet événement et toute l’humanité est convoquée. Certains auront une part active, ce sont les premiers témoins, choisis, choyés, préparés et sanctifiés. Quelle beauté que le Seigneur apparaisse dans les cœurs puis dans un corps, qu’il ait ‘besoin’ de nous pour accomplir son Œuvre de grâce, qu’il s’incline humblement devant sa création et sa créature pour réaliser sa Merveille, qu’il nous aime à ce point !
- 1. Avent, avec des femmes et des hommes.
Notre religion est la religion de l’Incarnation. Non seulement Dieu prend chair à Noël mais il partage sa vie et son œuvre avec nous, il a besoin de nous ou plutôt, il a voulu avoir besoin de nous pour arriver à ses fins. Nous méditerons à Noël sur ce mystère extraordinaire de la venue de Dieu en notre humanité mais aujourd’hui, la liturgie nous présente deux femmes, cousines et croyantes, dont le ventre sera porteur de grâce et de bénédictions, dont le cœur est plein de grâce et d’Esprit saint. Les textes parlent d’entrailles, d’enfants, de mouvements, d’affection, de joie… Ils nous introduisent dans un mystère par le mystère de la féminité et du coup de l’humanité. Par un événement somme tout ordinaire, une grossesse, Dieu va nous parler. Il parle toujours par ce qui nous touche et nous rejoint, par notre expérience et les pas fragiles de notre existence.
Marie la mère : peut-on oublier Marie durant Noël ? Certains banalisent sa participation et la réduise à une mère-porteuse. D’autres nient toute sainteté personnelle ou toute préparation spirituelle de Marie. Nous catholiques, affirmons son immaculée conception (elle est exempte du péché originel et même actuel), sa sainteté comme participation à la sainteté de Dieu pour accueillir le Saint, sa foi pure et lumineuse qui répond ‘oui’ au projet divin, son amour total qui va dans le sens de l’amour du Père, sa virginité qui est signe de la gratuité divine pour le monde, sa maternité divine qui est signe de la divinité du Fils, sa maternité humaine qui sera tendresse pour ce fils particulier, entouré d’affection et de prévoyance, sa vie conjugale avec Joseph comme anticipation des noces célestes… Elle se met en route, elle a toujours un pas d’avance. Elle comprend la volonté divine et l’actualise dans son cœur et dans son corps. Une femme bien de chez nous qui ouvre le chez-nous de Dieu !
Elizabeth la mère : peut-on oublier la vieille Elizabeth ? Elle sait voir au-delà des apparences et comprend la maternité de Marie. Elle accueille elle-aussi un fils dans sa vieillesse, mais un fils exceptionnel, le précurseur, le dernier de prophètes, Jean le rempli de grâce et de fougue, le révélateur de l’Agneau. A la Visitation, Elizabeth est remplie de l’Esprit et reconnaît « la mère de son Seigneur ». Quel titre magnifique pour une toute jeune femme de chez nous qui vient visiter sa cousine ! Elizabeth ne se limite pas à sa Tradition, elle sait reconnaître la vérité avec des yeux remplis de lumière et de foi. Voilà donc une femme bien de chez nous qui sait accueillir le chez-nous de Dieu qui se présente avec Marie.
N’est-il pas beau que Jean trésaille d’allégresse avant même sa naissance ? Que les deux mères se rejoignent dans une même action de grâce ? Qu’Elizabeth entonne un chant d’amour et que Marie lui réponde par un autre chant d’amour, chants d’amour pour Celui qui répond, sauve, intervient, donne l’Esprit ! Enfin, les promesses sont accomplies, le temps de sa grâce est arrivé, enfin la longue attente est terminée et l’irruption du divin dans le monde est annoncée. Irruption dans le monde mais surtout dans notre chair, dans les méandres de notre humanité, dans les recoins de notre cœur, dans la beauté de nos regards et la pureté de nos yeux. Il vient, le Messie, le Roi, le Seigneur !
- 2. Avent, avec le Prince de la Paix.
Notre attente touche à sa fin. Il est à nos portes Celui qui va bouleverser l’histoire et le cosmos, qui va transfigurer nos vies et nos corps, qui va sanctifier nos relations et nous donner une identité nouvelle. Il est là celui qui va s’offrir et se sacrifier, s’ouvrir à l’amour et passer par la mort, celui qui se remettra entre les mains du Père pour faire jaillir l’Esprit de Résurrection et qui sera glorifié en nous emportant avec lui.
Le Christ, prince de Paix : ce prince est annoncé (Michée (, 1-4). Il doit rétablir la justice et le droit, assurer la vitalité de la Loi et raviver l’Alliance. Il défendra le juste et le pauvre et rétablira la vérité. Jésus est ce prince de paix, celui qui va droit au cœur des hommes et rétablit la relation avec le Père dans l’Esprit. Et même si la guerre gronde encore, la paix est un bien qui surpasse toute attente et qui rappelle l’humanité à ses origines et à son Dieu.
Le Christ, digne Fils du Père : la Lettre aux Hébreux (He 10) contemple l’œuvre du Christ. C’est une œuvre sacerdotale avant tout car il s’offre au Père et ainsi établit le culte nouveau, non pas avec des sacrifices extérieurs ou par substitution mais par le don total de lui-même, par une adhésion à la volonté divine, par une confiance absolue, par amour. « Me voici mon Dieu, je viens faire ta volonté. » Seul le Fils pouvait accomplir en plénitude la rédemption, car Homme, il touche nos entrailles et notre cœur, Dieu, il touche notre âme et notre esprit, notre être et notre existence. Seul le Fils peut faire des hommes et des femmes que nous sommes des fils et des filles, enfants de lumière pour la plus grande gloire du Père dans l’Esprit Saint.
- 3. Conclusion : l’amour de la mère du Seigneur.
Noël est arrivé : des hommes et des femmes de notre histoire ont participé à sa venue, à la possibilité de la naissance du Messie, à la nouveauté du Divin dans notre existence. Ils et elles sont de chez nous, ils et elles ont su reconnaître les signes. Que Noël ouvre nos yeux à la grandeur de notre humanité selon le cœur de Dieu.
Noël est arrivé : une jeune femme va révéler la profondeur de l’événement, Marie de Nazareth, épouse de Joseph, mère du Messie. Appelée « Mère su Seigneur », elle dit silencieusement la divinité du Fils, la beauté du Père et l’amour de l’Esprit pour nous-autres, hommes et femmes en recherche !
P. Francis